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Stirling Moss

Le Seigneur sans titre

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Le scénario était écrit. Fangio l'avait désigné pour héritier. En 1956, il allait transmettre le témoin à son équipier Moss, de dix-huit ans plus jeune que lui. Et Stirling aurait empilé les titres, tant Mercedes dominait alors la F1. Mais le drame du Mans 1955 provoque le retrait de Mercedes et torpille ce plan. Fangio trouve refuge chez Ferrari. Pas Moss. Fin 1951, Enzo Ferrari lui avait déroulé le tapis rouge : une course à Bari, pour se chauffer la voix, puis une saison complète en F1. Moss et son père tergiversent, évoquent d'autres offres. Vexé, Enzo reste de marbre. Mais, lorsque Moss pénètre dans le stand Ferrari à Bari, les membres de la Scuderia lui demande la raison de sa visite : Taruffi est inscrit au volant de la Ferrari initialement promise à Stirling. De dépit, Stirling jure que jamais il ne pilotera pour le Commendatore.

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Hélas, il tint parole. Car Ferrari allait dominer cette décennie. Tout Moss est dans cette anecdote: un infini talent, mais la vue courte. Hors Mercedes, cet ancien cavalier se trompa toujours dans le choix de ses montures. Ainsi s'explique l'invraisemblable: seize victoires en soixante-six Grands Prix, quatre deuxième places au championnat de 1955 à 1961, mais pas de titre mondial !

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A sa décharge, Moss eut un père. Avant-guerre, Alfred Moss avait disputé les cinq cents Miles d'Indianapolis. Puis fait fortune en montant une chaine de cabinets dentaires. Dès que Stirling eut 18 ans, Alfred finança ses débuts et l'accompagna sur les circuits. Mais ensuite, il fut trop présent. Son rêve était de créer sa propre écurie autour de Stirling. Alors, il influença ses choix. Le dirigea vers la structure privée de Rob Walker plutôt que dans les grandes équipes, où il n'aurait pas eu son mot à dire. Certes, Stirling mena à la victoire les Cooper et Lotus de Rob Walker. Mais il aurait gagné plus souvent s'il avait piloté directement pour Cooper ou Lotus...

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Pour que justice soit rendue, il faut toutefois ajouter deux éléments. Primo, la saison 1958: quatre victoires pour Moss, une pour Hawthorn. Le pilote Ferrari, plus régulier, l'emporte d'un point. Le titre s'est joué à Porto, avant-dernier Grand Prix de la saison, enlevé par Moss. Derrière lui, Hawthorn fait un tête-à-queue et cale à 1 kilomètre de l'arrivée. Lors de son tour d'honneur, Moss incite Mike à faire volte-face pour profiter de la déclivité de la piste. Hawthorn repart et franchit la ligne en deuxième position. Mais les commissaires veulent le déclasser; il a emprunté le circuit à contre sens, le temps de se relancer. Spontanément, Moss vient témoigner en sa faveur: Hawthorn conserve sa 2è place. Mike appelait Moss "Le Petit Chauve". Pour rester fidèle à son éthique, Stirling a défendu un homme qu'il n'aimait pas, et lui a offert le titre.

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Secundo, Monaco 1961. Moss hisse la Lotus de Rob Walker en pole position, devant les Ferrari et la Lotus officielle de Clark. Les pilotes Ferrari le laissent d'abord filer, persuadés qu'ils pourront le rattraper. A mi-parcours, Tavoni leur fait signe d'aller croquer l'Anglais. Moss résiste, hausse encore le rythme. Von Trips craque. Puis Phil Hill. Reste Ginther. A chaque boucle, les deux hommes réduisent leur temps. Ginther échoue sur les talons de Moss, donc le record du tour est de trois secondes inférieur à sa pole position ! Fangio au Nurburgring 1957, Moss à Monaco 1961, Stewart au Ring 1968: telles furent les trois plus belles démonstrations de pilotage de l'histoire de la F1.

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En 1961, les Ferrari ne seront battues que deux fois. Par Moss, à Monaco et sur le Ring, deux circuits qui soulignent le talent d'un pilote. Enzo Ferrari a compris la leçon. Il offre à Moss un volant en 1962. Stirling, qui n'a pas oublié Bari, avance une contre-proposition: OK pour courir sur une Ferrari, à condition qu'elle soit engagée par Rob Walker et porte ses couleurs. Ferrari, acculé, accepte.

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Mais il était dit que jamais Moss ne piloterait une Ferrari, fût-elle bleu nuit. Stirling a un défaut: il aime l'argent, court trop et n'importe où, pourvu qu'il y ait un chèque. Parenthèse, ce goût lui est resté: Moss est aujourd'hui le seul grand nom du sport automobile à monnayer ses interviews. Il sort de piste à Goodwood, début 1962, dans une course sans importance, au volant d'une Lotus. Paralysie faciale, longue rééducation. Un an plus tard, il remonte dans une voiture de course, toujours à Goodwood. Quelques tours suffisent: il n'a plus les mêmes réflexes, le même pouvoir de concentration. A 34 ans, Stirling annonce son retrait de la compétition, devenant pour toujours le champion sans couronne.

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Biographie et Palmarès:

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Né an Angleterre le 17 septembre 1929, décédé le 12 avril 2020 à l'âge de 90 ans.

Stirling c'est 66 Grand Prix de 1951 à 1961 - 16 victoires - 16 pole positions - 20 records du tour et 186,5 points marqués

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